Memorandum 2024

 

MEMORANDUM : Accompagner la transition alimentaire en soutenant le déploiement des Maisons de l’Alimentation durable en Wallonie

 

Le 27 octobre 2022, le Gouvernement wallon a adopté le plan d’action Food Wallonia – concrétisant l’ambition de mettre en place une Alliance Emploi-Environnement sur l’Alimentation qui tient compte des enjeux auxquels les acteurs de la transition doivent faire face.
Food Wallonia comporte 19 actions qui contribuent à répondre aux six objectifs stratégiques de la transition vers un système alimentaire durable.

En tant que signataires, nous sommes directement concernés par l’action A.3 de la stratégie Food Wallonia qui vise à « Améliorer l’accès à une alimentation de qualité des ménages vivant dans la précarité et/ou la pauvreté en soutenant la mise en œuvre d’actions communautaires ».  Au travers de cette action, il s’agit de créer un dispositif de soutien à la mise en œuvre d’actions communautaires conçues et menées avec les publics ciblés afin d’améliorer l’accès à une alimentation de qualité pour les ménages vivant des situations de précarité et/ou de pauvreté.

Par ailleurs, nous nous inscrivons pleinement dans l’action A.7. « Identifier et diffuser les pratiques en matière d’actions d’éducation, de sensibilisation et de promotion visant la transition vers un système alimentaire durable et les communiquer au service d’un récit commun. »

Dans le cadre de l’appel à projets « Soutenir la relocalisation de l’alimentation en Wallonie », lancé en 2020, deux projets de Maison de l’Alimentation durable (MAD) ont bénéficié d’un subside et ont pu voir le jour : l’un à Charleroi (la MAD Charleroi Métropole), l’autre à Liège (la Maison de l’Alimentation durable et inclusive de Liège – MAdiL).

L’évaluation commune de ces deux projets a mis en évidence que les MAD participaient, à des degrés divers, aux dynamiques de transition alimentaire à l’échelle locale, tout en renforçant la démocratie et l’inclusion alimentaire.

Dès lors, nous demandons à la Wallonie de pérenniser et d’amplifier ces dispositifs car nos projets pilotes ont montré qu’ils permettent de :

Favoriser l’accessibilité à l’alimentation durable

La plupart des activités proposées actuellement par les MAD sont gratuites ou proposées à des prix démocratiques. En effet, les MAD ont la volonté de toucher des publics qui sont parfois éloignés de l’alimentation durable.

Par ailleurs, l’organisation de programmes d’accompagnement de type « Défis Alimentation durable » ou « cycles de rencontres culinaires » avec des groupes de bénéficiaires permet de toucher des ménages plus précaires lorsqu’ils sont menés en étroite collaboration avec des structures relais (ex. : CPAS). Le programme d’activités, coconstruit avec les participants, vise à développer des solutions concrètes pour faciliter l’accès à une alimentation durable à un prix abordable.

Accompagner l’émancipation des publics vers l’alimentation durable

Les MAD mènent des animations d’information et de sensibilisation à l’éco-citoyenneté alimentaire au travers d’actions concrètes (ateliers culinaires, activités d’autoproduction, visites de producteurs locaux…). Mais au-delà de la « simple » sensibilisation, il s’agit d’outiller les différents publics, de les rendre autonomes et de les mettre en capacité de reproduire des savoir-faire transmis au cours des activités proposées par les MAD.

Étant fortement ancrées dans leur territoire respectif, elles répondent régulièrement à des demandes émanant de multiples acteurs pour des interventions et des accompagnements de leurs publics.

Créer des partenariats locaux

Pour organiser leur programme d’activités, les MAD s’appuient régulièrement sur des partenaires locaux, de manière à recourir aux forces vives et ressources existantes. Elles mettent en réseau les différents organismes œuvrant dans le secteur de l’alimentation durable à l’échelle d’un territoire.

Les MAD sont également impliquées dans des dynamiques de territoire telles que les Conseils de Politique alimentaire (CPA) ou les Ceintures alimentaires. En soutien essentiel à ces projets, les MAD opèrent comme chevilles ouvrières pour assurer l’information, la sensibilisation et la formation des citoyen·ne·s et des acteur·rice·s de terrain, tout en veillant aux questions d’accessibilité.

Les MAD sont partenaires d’évènements et d’activités grand public organisés en collaboration avec différents acteurs du territoire.
Par conséquent, elles constituent l’un des maillons du système alimentaire local et ont pleinement un rôle à jouer en termes de démocratie alimentaire.

Développer un ancrage territorial local

Les MAD ont pour ambition de développer un ancrage local ou supracommunal. Dans le cadre des projets pilotes, la visibilité des MAD a davantage été accentuée/favorisée via des outils de communication virtuels (Internet) et en proposant des activités « hors les murs ». Cette volonté était liée au fait que les MAD ne disposaient pas de lieu physique dédié ou se situaient dans des espaces fermés.

À l’avenir, l’ancrage des MAD doit être renforcé en bénéficiant de la mise en place de structures physiques facilitant leur visibilité auprès de tous les citoyens. Elles doivent devenir de véritables « maisons » ouvertes au grand public et des vitrines de propositions alimentaires du territoire.

Valoriser les producteurs locaux

En tant qu’actrices de l’éco-citoyenneté alimentaire, les MAD contribuent à leur niveau, à faire rayonner les producteurs en circuit court des marchés, des épiceries locales, des groupes d’achat commun (GAC), des projets de Community Supported Agriculture (CSA)…

Plusieurs activités concrètes permettent de créer ou recréer du lien entre mangeurs et producteurs : l’organisation de tables d’hôtes en présence de producteurs, les visites sur champs, le partenariat avec des producteurs/distributeurs de produits locaux pour l’animation d’ateliers culinaires, le développement de GAC ou autres dispositifs similaires.

Former des professionnels à l’alimentation durable

Les MAD ont clairement un rôle à jouer en matière de formations. Celles-ci peuvent à la fois cibler des acteurs de terrain (acteurs sociaux, de la santé ou de l’éducation…) mais aussi des citoyens bénévoles via des formations d’ambassadeurs de l’alimentation durable. Ce type de formations permet d’outiller les participants pour les mettre, par exemple, en capacité d’animer des « Défis Alimentation durable » auprès de groupes constitués et/ou leur permettre d’adapter leurs animations propres en faveur d’une alimentation plus durable et plus inclusive.

Devenir un centre de ressources

Les MAD entendent devenir des centres de ressources pour pouvoir répondre aux demandes en termes d’outils d’animation, supports documentaires… relatifs à l’alimentation durable.

Elles peuvent aussi être à l’initiative de la création de supports (ex. : fiches-recettes, dossier pédagogique, malle à outils…) qui pourront être mis à la disposition des acteurs sociaux, de la santé ou de l’éducation.

Soutenir et essaimer

Les MAD souhaitent enfin être au cœur de dynamiques innovantes en jouant un rôle de facilitateur pour la mise en place de projets collaboratifs (ex. : GAC, cuisines de quartier, projets VRAC), notamment en œuvrant avec des structures déjà opérationnelles dans ce secteur sur le territoire telles que les Ceintures alimentaires.

De plus, les MAD actuelles peuvent mettre leur expertise au service de la création des nouvelles MAD en Wallonie (Namur, Huy, Mons…), ce qui pourrait favoriser la mise en place d’un véritable réseau de MAD contribuant à accélérer la transition vers un système alimentaire durable et équitable.

En conclusion

L’ancrage territorial des MAD s’inscrit dans le temps long, leurs actions visant, entre autres, des publics qui se pensent exclus du débat et de l’accès à l’alimentation saine, durable et de qualité.

Il est important d’identifier les freins, de déconstruire les croyances, de sensibiliser et de donner les clés, pour accompagner et impliquer l’ensemble des mangeurs dans cette transition alimentaire.

Nous sommes convaincus que la création de nouvelles MAD, notamment sur les territoires où émergent des instances de gouvernance alimentaire de type CPA, pourra faciliter la sensibilisation des publics aux nombreux enjeux de la transition alimentaire, à savoir : l’accès de l’ensemble de la population à une alimentation saine et équilibrée, locale et de qualité, à un prix juste pour le mangeur et le producteur.

Pour toutes ces raisons, nous demandons, à la Wallonie et aux responsables politiques concernés par la question alimentaire, de soutenir, de façon structurelle, les Maisons de l’Alimentation durable et leur développement à l’échelle de la région.

Les MAD nécessitent un financement annuel minimal pour garantir au moins deux équivalents temps plein, assurant ainsi la coordination du projet et l’animation nécessaire pour accomplir leurs missions. De plus, des frais de fonctionnement sont indispensables, pour collaborer avec des partenaires locaux, afin de répondre aux nombreuses demandes des divers acteurs du territoire. Il est également essentiel que les MAD puissent bénéficier de locaux aménagés accessibles à tou·te·s pour y déployer un programme d’activités à la hauteur de leurs ambitions.